Les Bozarts

de l'Abbevillois

ECOLE DES BEAUX ARTS – GINETTE ET BERNARD

Du 4 février 2012 au 16 mars 2012

GINETTE ET BERNARD

Ginette Petit

Les arts plastiques n’ont pas toujours occupé la vie de Ginette Petit.
Pendant quatre décennies, elle s’est d’abord consacrée au  grand œuvre de son existence.
Ce fût pour elle un travail magnifique, grandiose, une mission quasiment héroïque dont elle s’est acquittée avec la modestie et l’humilité des grandes personnes, avec l’amour et la tendresse surtout, déversés sans retenus sur sa nombreuse famille.
La famille de Ginette et ce n’est vraiment rien de l’écrire, constitue le socle de son existence, les fondations puissantes d’une vie d’artiste longtemps en sommeil. Elle aura dû attendre le départ de son dernier petit pour s’affranchir enfin et penser un peu à elle, pour s’installer fièrement sur ce socle patiemment érigé! Elle aura dû attendre encore pour puiser dans cette source d’énergie familiale et porter son regard sur l’horizon désormais complètement dégagé de la pratique artistique.
Le ressort très longtemps contenu, bridé, verrouillé de son désir de création lui a fourni malgré cela une extraordinaire raison d’espérer et de rêver car elle savait cette puissance au fond d’elle même; elle sentait cette force en attente, remisée, mais entretenue patiemment, huilée, lustrée et conservée dans l’écrin de son âme. Elle la sentait prête à jaillir la fontaine de jouvence, attendant encore son heure, le moment, la fenêtre de tir. Et c’est le décollage enfin, la machine s’est mise en marche, pour  notre bonheur, prodigieuse, infatigable, systématique, analytique… Elle passe par la réalité, c’est-à-dire par la représentation de la réalité, celle qui l’entoure, les paysages, les petites églises, les jardins et les fleurs. Elle fourbit ses pinceaux sur ce qu’elle connaît, sur ce qui la rassure aussi, probablement. Mais bientôt elle se sent à l’étroit dans ces vastes plaines notre little big woman et elle explore de nouvelles pistes, de nouveaux champs esthétiques qu’elle éprouve les uns après les autres. Elle nous livre enfin des œuvres abstraites de techniques mixtes et… pas si abstraites en vérité, car de ses combinaisons naissent des images, des histoires, des émotions et des sensations qui nous sont plutôt familières !
Ginette Petit nous rappelle enfin que le miracle de la puissance créatrice, s’agissant d’art ou d’autres champs de l’activité humaine, n’en demeure pas moins laborieux.

Bernard Bermont

Bernard Bermont a installé son bestiaire fantastique dans notre galerie. Son univers est peuplé, de créatures, de personnages et de formes tout droit sortis des paysages embrumés de la côte picarde. Ils nous inspirent des contes et des légendes autour des  baies de somme et d’authie.
Chasseur et pêcheur, Bernard les a parcourus et explorés par tous les temps et à toutes les heures du jour et de la nuit.
Je l’imagine dans son hutteau, immobile, cloîtré et frissonnant, scrutant l’horizon de son camouflage façon bière.
Je l’imagine en proie à la gamberge alors qu’aucun volatile décidément ne daigne le pointer du bec !
Je l’imagine baillant en digérant l’une des ses terrines interdites et modelant  déjà ses futures et improbables bestioles de terre.
De cette attente, l’artiste trappeur aura tiré mille occasions de fuir, de s’élancer à tire d’ailes, de constituer d’espace et de temps le terreau de son jardin invisible.
Il l’ignorait alors peut-être, mais elles étaient sans doute déjà  en lui, ses créatures, ses passagers clandestins, les filles et les fils de sa baie cérébrale.
Lorsque Bernard se met à l’ouvrage, l’ordre trépasse, un joyeux chaos s’installe sur la table et sur le sol, les choses s’agglomèrent autour de lui, des débris divers et variés, d’origine naturelle le plus souvent, des brindilles, de la paille, des branches, des planches de bois, des plumes, des petits os, qui ont été collectés au cours de ses pérégrinations côtières.
Il y en a partout ! Mais de ce magma, que seuls les initiés peuvent comprendre, naît rapidement une forme, d’une idée que Bernard a bien calée dans sa tête et qu’il fait jaillir avec une extrême dextérité.
Bernard Bermont a très bien compris la terre ! Est-ce de l’avoir foulée ? D’y avoir enfouie ses bottes en caoutchouc ? Toujours est-il que ses doigts, ses mains et son esprit assurent comme des bêtes, ils gèrent, ils maîtrisent, inventant la méthode et l’outillage indispensable à l’aboutissement de chaque œuvre.
Notre société voue un culte absurde à l’éphémère et superficielle apparence de l’être mais Bernard nous prouve que la finesse, la légèreté et le raffinement savent aussi jouer au chat et à la souris !

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